13.2.06

Hoodwinked

Bon alors je vous vois venir : un nouveau film pour les mômes, en 3D, après l’histoire du gros Ogre vert, ton bidule sent le re-bouillit. Et là je vous répondrai oui mais non !

Red, petite fille tranquille s'en va voir sa grand mère à l'autre bout de la forêt. Elle est heureuse, elle fait de la musique en disant au monde la joie qui l'habite. Bref nous l'avons tous repéré, elle est la réplique du personnage de l'histoire enfantine lue et re-lue dans les maisons qui ont abrité nos vies lors de nos jeunes âges.

Seulement voilà, dans le film, Red, sa grand mère et les autres n'ont pas les rôles que l'on imagine. Un terrible bandit soustrait aux habitants de la forêt leur formules de pâtisseries. Nous sommes dans un monde de fairy tales, un loup qui se ferait bien un rôti d'agneau, un petit mammifère friand de noisettes totalement barré, un travailleur de bois forestier tyrolien abruti qui auditionne pour des pub de pommade, un vieux goat marqué d'un terrible sort qui l'oblige à yodlliler toute parole et une grand-mère tatouée.

La narration se déroule au travers des interrogatoires menés par la grenouille Flippers. Un fait amène plusieurs témoignages : lorsqu'un arbre tombe, il y a mon histoire, votre histoire et l'histoire de l'arbre.

Un bout de temps est passé avant que je réalise que je me suis fait emporter dans le film, phénomène qui ne m'étais pas arrivé depuis pfff longtemps. Je ne veux pas en parler plus, je détruirai les surprises.

Un film qu'il est bien, qu'il est drôle, à voir en VO, pour goûter aux différentes subtilités. Pas mal d'effets Matrix (pour l'humour), et une bonne dose d'extrême. Vive la grand-mère, moi qui n'aime pas les vieux, qui ne veux pas le devenir (pas de retraite, pas de raison de devenir vieux) j'l'adore.

Pour des raisons de style le texte que vous avez lu est un texte sensé, et le faire ne fût pas si aisé...

Géométrie Variable

Un soir de Janvier, après une journée de route, je me suis retrouvé près de la ville morte au sud-Est de Paris qui me sert de chambre depuis 5 mois. J’allume la radio, je tombe sur une interview d’un jeune auteur, sur Nova. J’écoute la lecture de quelques extraits, dont l’humour noir provoqua en moi un éclat de rire si long qu’un piéton a bien cru voir sa vie défiler devant ses yeux.

Les différents extraits et le thème principal du livre ayant éveillé en moi une certaine curiosité, je m'empresse de commander le bouquin. Il m'a fallu cinq petits voyages en RER pour le terminer, les pages s'enchaînent à un rythme effréné, la lecture se fait quasiment en apnée, il est très difficile de ne pas rester UHUé dans le livre, comme il aurait pu le dire
ou plutôt l'écrire, car à l'instar de La Disparition (que je n'ai pas lu) ce roman est un lipogramme de la troisième lettre de l'alphabet (*). Ce qui fait de ce roman, malgré son contenu, un texte sensé, mais qui nous permet de lire quelques expressions des plus figurées comme gambader sur le flageolet.

L'histoire : Olivier Grange, né Triangle, au volant de sa voiture, le 31 décembre au soir, tente de rejoindre Périgueux, la pédale des gaz soudée au planché, se jouant des villages, des virages et des mirages. Olivier est en colère. Olivier veut faire payer l'abandon de son père, qui après la naissance de son fils, s'est enfui, a balayé ses traces et s'est rebaptisé Losange.

La géométrie variable.

Les bras tendus sur le volant, le pied sur l'amanite, les baffles hurlent une seule et unique chanson d'un avion sans ailes, la bande magnétique bloquée dans l'autoradio, les yeux lui piquent, à notre héros, et entre deux envies d'explosions, il s'endort. Ses rêves sont plus ou moins les flash-back de sa vie passée, du mensonge de ses parents, « au nom du p'tit ». Olivier est joueur de théâtre, et comme l'est son demi frère. Second fils de son demi père. Son lui que Losange a finalement accepté, après avoir fui le premier. Sa mère, grande reine du Drame, lui a menti aussi, mais elle est restée pour l'aimer, alors ce n'est pas pareil. Le mensonge est le même, elle l'a entretenu, mais il ne lui en veut pas plus que ça.
Le thème du roman est le mensonge sous toutes ses formes, la torture des êtres. Le petit se souvient qu'avant ce monsieur qu'il doit appeler Papa, parce qu'un jour on lui a dit de le faire, il y en avait un autre, une autre odeur, une autre présence, quelque chose que sa mémoire n'avait pas oublié. Sur cette route nationale, olivier repense à sa vie, à sa femme, à son amante, à sa fille, puis son père. L'amour affronte la haine dans un combat sans merci, et la colère gagne, il va lui faire bouffer les chicos par la racine à cet enkugné. Jusqu'où sa course à la vitesse du son le mènera-t-il ? à sa perte, ou bien pourra-t-il renaître après avoir fini son analyse ?

Olivier Bordaçarre
, l'auteur, nous donne ici son premier roman, empli d'humour noir, écrit avec un véritable style. Un livre contenant essai, saynètes, et autres petites histoires. L'auteur s'en va parfois, au loin, dans ses divergences pour le plaisir, et recentre le tir rapidement, pour pas qu'on se perde en chemin, sur cette route de campagne, le dernier soir de décembre.

158p, 14€ chez fayard

(*) Un lipogramme est un texte dans lequel on s'impose de ne pas utiliser une ou plusieurs lettres de l'alphabet.